post de grobinew
Le camp britannique d'Etaples était un centre de préparation des soldats venant du Commonwealth, mais aussi un centre disciplinaire réputé très dur. C'est aussi l'endroit où étaient réceptionnées et montées les mitrailleuses qui devaient partir pour le front allié. L'ennemi allemand, attiré par les installations militaires, bombarda la ville, malgré la présence d'un hôpital militaire, causant destructions et victimes parmi la population.
Aujourd'hui, seul le grand cimetière "anglais" comme le nomme les étaplois est le seul témoignage de l'existence de cette infrastructure militaire à l'époque et aujourd'hui
Plan du camp d'Étaples en 1917. Fonds Achille Caron. Archives départementales du Pas-de-Calais, 88 J 30.
Suffisamment éloigné des combats mais bien relié par les voies de chemin de fer vers Arras et Béthune, Etaples dont la population civile étant aussi réputée accueillante fut retenue dès 1915 par l'état major britannique pour y installer un camp de 60 à 70 000 hommes où les troupes pouvaient s’entraîner en permanence sur le Mont Levin. Les installations comprenaient hôpitaux militaires et dépôts au sein d'une infrastructure gigantesque qui sera en service jusqu'en 1919.
Photo de troupe néo-zélandaise au Mont-levin (repéré "Rombly Reservoirs" sur le plan )
Voir les photos d'Achille CARON photographe civil originaire d'Etaples qui a immortalisé moult scènes de vies des tommies sur le camp.
Cette formidable collection photos ont aujourd'hui étaient acquise par le musée Quentovic d'Etaples-sur-mer.
Les renforts débarquaient au port de Boulogne-sur-Mer, et après une marche forcée de 26 km, étaient soumis à un encadrement impitoyable, de la part des instructeurs, surnommés les « canaris », car porteurs d’un brassard jaune. Ces instructeurs, dans leur majorité n’ayant jamais vu le front, mêlent sadisme et cruauté. Ils étaient selon le soldat Notley :
« les pires individus que l’on puisse imaginer et qui transformaient la vie des hommes en enfer ». Etaples a connu, en septembre 1917, la révolte des soldats contre les conditions d’entraînement dans ce camp qu'ils surnommaient le "Bull-Ring" (Traduisez: l'arène au taureau). Le Contrôle postal du 17 septembre 1917 évoque la révolte de soldats écossais et canadiens, barrant les ponts avec des mitrailleuses. Le caporal Reynolds témoigne :
« Au pied de la colline se trouvait le camp de détention n°1 avec ses malheureux prisonniers attachés par les poignets pendant que, tout en bas sur la plage, luttant dans la boue et la vase, des centaines, des milliers d’hommes de troupes étaient injuriés et molestés. ». Des déserteurs s’organisent en bandes, dans les bois environnants. Une société de déserteurs, « Le Sanctuaire » se forme et trouve refuge dans les tunnels et les puits autour de Camiers. Étaples vécut pendant plusieurs jours des heures dramatiques ; dans ses rues se déroulèrent des scènes extrêmement violentes...
Selon certaines études (Allison et Fairley :
The monocled mutineer, de 1978, et M. Lecat :
Quand les laboureurs courtisaient la terre, 1995), la rébellion débute le 9 septembre 1917. Sur la place d’Etaples, le caporal William Wood est arrêté par la
Military Police (MP), pour avoir conversé avec une infirmière, conversation alors interdite ! Le chef de patrouille abat le caporal, lors de l’échauffourée consécutive à l’interpellation. La nouvelle se propage rapidement parmi les Ecossais, Australiens et Néo-Zélandais du camp. Ils s’emparent des armes d’entraînement du camp. La mutinerie débute. Les soldats révoltés se répandent en ville malgré la tentative d’interception du
Royal Fusiliers sur le pont des Trois Arches. La chasse aux « canaris » et aux MP commence dans les rues et maisons d’Etaples. Un millier de révoltés venus du Touquet, gagnent Etaples. Le général Thomson, commandant du camp d’entraînement, et ses subordonnés sont jetés du pont sur la Canche. Des exactions sont commises dans la ville d’Etaples. Lucien Roussel, Etaplois de 15 ans, témoigne :
« Les troupes britanniques s’abattirent la ville comme de véritables sauvages, chapardant et détruisant tout sur leur passage. Ils occupèrent la Place des jours entiers ».
Après trois jours de révolte, l’assaut sur Passchendaele étant imminent, le commandement britannique décide d’intervenir. Le 19ème Hussards et une partie de la
1st Honorable Artillery Company sont dirigés sur Etaples. Le 13 septembre, deux bataillons retirés du front d’Artois viennent les rejoindre, suivis d’un escadron de Gurkas de l’Armée des Indes. Le 14, le camp est investi. Les révoltés doivent gagner le front. Rien ne permet aujourd’hui d’établir le nombre exact de soldats qui ont alors été passés par les armes.
A Boulogne, l’armée britannique doit aussi faire face à des mutins parmi les
Labour Corps. Le maréchal Haig fait exécuter 23 ouvriers égyptiens, puis plus tard, 9 ouvriers chinois.
A Etaples, le caporal Jesse Short a été fusillé le 4 octobre 1917. Le chef de la mutinerie Percy Toplis, déserteur, le « mutin au monocle », est arrêté le 15 octobre 1917 à Rang-du-Fliers ; il s’évade, et est abattu en Angleterre en 1920 dans ce qui s'apparente à une chasse à l'homme...
"