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jupiterMaurice Genevoix (Decize, 29 novembre 1890 – Alicante, 8 septembre 1980 (à 89 ans)) est un romancier-poète français, héritier du réalisme.
L’ensemble de son œuvre témoigne des relations d’accord entre les hommes, entre l’Homme et la Nature, mais aussi entre l'Homme et la Mort. Son écriture est servie par une mémoire vive, le souci d'exactitude, et le sens poétique. Normalien lettré, il admire tout autant l’éloquence des artisans ou des paysans. D’une grande vitalité malgré ses blessures reçues lors de la Première Guerre mondiale près du village des Éparges, en avril 1915, et animé de la volonté de témoigner, il écrit jusqu’à ses derniers jours. Son œuvre, portée par le souci de perpétuer ce qu'il a tenu pour mémorable, produit d'une grande longévité littéraire, rassemble 56 ouvrages.
Maurice Genevoix est surtout connu pour ses livres régionalistes inspirés par la Sologne et le Val de Loire comme son roman Raboliot (Prix Goncourt 1925). Il a cependant dépassé le simple roman du terroir par son sobre talent poétique qui, associé à sa profonde connaissance de la nature, a donné des romans-poèmes admirés comme la Dernière Harde (1938) ou la Forêt perdue (1967).
Maurice Genevoix a également témoigné des épreuves de la génération qui a fait la Grande Guerre de 14-18, particulièrement dans Ceux de 14, recueil de récits de guerre rassemblés en 1949. Il s'est aussi penché plus largement et plus intimement sur sa vie en écrivant une autobiographie : mille jours, publiée en 1980.
Descendant d'un aïeul genevois catholique ayant fui la Genève calviniste vers 1550-1560 pour rejoindre la Creuse et dont le nom prend alors un -x, Maurice Genevoix est issu d'une famille de médecins et pharmaciens par sa lignée paternelle. Son père Gabriel Genevoix rencontre Camille Balichon à Châteauneuf-sur-Loire. Il naît le 29 novembre 1890 à Decize, dans la Nièvre, à 35 km en amont de Nevers
Un an plus tard, ses parents migrent à Châteauneuf-sur-Loire pour reprendre une affaire familiale, un « magasin » réunissant une épicerie et une mercerie. Il puisera de cette période la plupart des souvenirs évoqués dans Trente mille jours et Au cadran de mon clocher. Il tiendra pour un privilège d'avoir passé son enfance dans une bourgade rurale d'avant 1914. Son frère René, qui deviendra médecin, naît en 1893.
Sa mère meurt le 14 mars 1903 d'une attaque d'éclampsie, alors qu'il n'a que douze ans. De cette perte, il gardera une éternelle déchirurequi transparaîtra dans plusieurs romans, comme Fatou Cissé ou Un Jour. Le veuvage de son père le laisse esseulé. Il trouve cependant un réconfort sur les bords de la Loire où il passe son temps libre et où il puisera l'inspiration de ses futurs écrits (Rémi des rauches, la Boîte à pêche, Agnès, la Loire et les garçons).
Ses étudesReçu premier du canton au certificat d’études, il entre interne au lycée Pothier à Orléans. Il découvre alors « l’encasernement, la discipline, les sinistres et interminables promenades surveillées. » Il retracera cette période de sa vie dans l’Aventure est en nous. Puis il entre pensionnaire au lycée Lakanal à Sceaux, où il est khagneux durant trois années (1908-1911). Il est admis à l’École normale supérieure de la rue d'Ulm. Il effectue une des deux années de service militaire, comme le permettait alors le statut particulier des jeunes Français admis aux grandes écoles. Il est affecté à Bordeaux, au 144e Régiment d’infanterie. Il entre ensuite à l’École normale supérieure et, deux ans plus tard, présente son diplôme de fin d'études supérieures sur « le réalisme dans les romans de Maupassant ». C’est à cette période qu’il envisage une carrière littéraire. Mais ce seront les encouragements de Paul Dupuy l’incitant à écrire son témoignage de guerre qui l’emporteront sur l’orientation du jeune Genevoix.
Il est alors cacique de sa promotion. Il lui reste à accomplir une dernière année d’études universitaires pour se présenter à l’agrégation et aborder une carrière universitaire. Il pense alors à se faire nommer comme lecteur dans une université étrangère pour connaître des formes de cultures originales, mais également afin de disposer de temps pour écrire.
La guerreIl est mobilisé lors de la Première Guerre mondiale, le 2 août 1914, et sert comme sous-lieutenant dans le 106e régiment d’infanterie. Sa division, la 12e DI , appartient à la IIIe armée commandée par le général Ruffey. Il participe à la bataille de la Marne et à la marche sur Verdun. Le 17 février 1915, la 12e division est envoyée à l'assaut pour reprendre le village des Éparges. Pendant plusieurs mois, le commandement français tente de tenir les positions conquises.
C'est tout à la fin de cette bataille que Maurice Genevoix est très grièvement blessé de trois balles le 25 avril 1915 sur la colline des Éparges. Son meilleur ami dans cette guerre, un saint-cyrien, le lieutenant Porchon, avait été tué quelques jours plus tôt. La lettre du docteur Lagarrigue, adressée à Maurice Genevoix le 2 mai 1915, témoigne de la gravité de ses blessures : « Je suis navré de vous savoir si grièvement touché. Mon pauvre vieux, c'est avec une émotion profonde que je vous ai vu, accablé de fatigue et j'oserais dire de « gloire », sur cette poussette incommode qui vous amenait à Morilly. Je n'ai pensé qu'à vous expédier au plus vite à Verdun, car votre pâleur m'inquiétait beaucoup. Je suis navré certes, mais rassuré maintenant ; je craignais le pire, et l'absence de nouvelles m'impressionnait péniblement. ».
Il est soigné sept mois durant, conduit d'un hôpital à l'autre : Verdun, Vittel, Dijon, puis Bourges. Il doit peut-être en partie sa survie à sa remarquable condition physique. Les blessures reçues au bras et au flanc gauche le marquèrent pour le restant de sa vie. Il est réformé à 70 % d'invalidité et perd l'usage de la main gauche.
Il retourne alors à Paris où il assure un service bénévole à la Father's Children Association, logeant à l'École normale. Le nouveau directeur de l'école, Gustave Lanson, lui propose de reprendre ses études afin de présenter l'agrégation. Maurice Genevoix refuse afin d'entreprendre la rédaction de son témoignage de guerre
La rencontre des VernellesGravement atteint de la grippe espagnole en 1919, il retourne chez son père dans le Val de Loire, retrouvant le village de son enfance. Après avoir été écrivain de guerre, il entreprend la peinture du pays de Loire. En 1927, tirant parti du prix Goncourt décerné pour Raboliot (1925), il rachète une vieille masure au bord de la Loire à Saint-Denis-de-l'Hôtel, au hameau des Vernelles : une « vieille maison, rêveuse, pleine de mémoire et souriant à ses secrets. » Il y passe un premier été avec le chat Rroû, période dont il tirera un roman du même nom. Après la mort de son père en juillet 1928, il s'y installe en 1929, pour un premier séjour de vingt ans. C'est dans cette maison, dans un bureau donnant sur la Loire, qu'il écrira la plupart de ses livres.
En 1937, il épouse Yvonne Montrosier, médecin originaire d'un village proche de Saint-Affrique, qui mourra l'année suivante. Il apprend la déclaration que la France entre en guerre alors qu'il est en voyage au Canada. De juin 1940 à début 1943, il quitte les Vernelles, en zone occupée, pour s'installer en Aveyron, chez ses beaux-parents. Il y écrit Sanglar (rebaptisé plus tard La Motte rouge), un épisode romanesque des guerres de religion, dont l'épigraphe d'un moine de Millau évoque à mi-mot l'Occupation : « c'était un temps fort calamiteux et misérable ». Il se marie en 1943 avec Suzanne Viales, déjà mère d'une fille prénommée Françoise, puis rejoint les Vernelles, qu'il retrouve saccagées. En 1944 naît sa fille, Sylvie.
L’Académie françaiseIl est élu sans concurrent à l’Académie française le 24 octobre 1946, le même jour qu’Étienne Gilson, puis reçu le 13 novembre 1947 par André Chaumeix au fauteuil de Joseph de Pesquidoux. Il s’était porté candidat plus tôt la même année au fauteuil de Louis Gillet mais s'était retiré devant Paul Claudel. Quatre ans plus tard, il s’installe à Paris, ville qu’il apprend à aimer, dans un appartement de l’Institut, quai Conti.
Il devient secrétaire perpétuel de l’Académie française en octobre 1958, succédant à Georges Lecomte. De 1958 à 1963, il rédige personnellement le discours d'attribution à chaque lauréat des grands prix de littérature, du roman, de poésie, ou d’histoire (prix Gobert). Sous son impulsion, l’Académie française affirme sa présence et sa compétence au sein du Haut Comité de la langue française, créé en 1966, et du Conseil international de la langue française. Sous son autorité, ont été créées les commissions ministérielles de terminologie qui proposaient des équivalents aux termes anglais proliférant dans les vocabulaires scientifiques et techniques. Les propositions étaient soumises à l'Académie des Sciences et à l'Académie Française avant d'être officialisées par arrêté ministériel (le premier arrêté ministériel date de 1972, source Monique Feyry (Rapporteur du Haut Comité de la Langue Française de 1968 à 1973).
Il démissionne du poste de secrétaire général de l’Académie en janvier 1974, ce qu’aucun secrétaire perpétuel n'avait plus fait avant lui depuis Raynouard en 1826. À quatre-vingt-trois ans, il pense en effet qu’il a encore d'autres livres à écrire, devant pour cela se démettre de ses fonctions. D’aucuns verront dans cette démission l’expression de son goût pour la liberté.
La retraite aux VernellesMaurice Genevoix quitte alors Paris pour retrouver les Vernelles, qu'il considère comme son port d'attache. Devenu octogénaire, il écrit régulièrement et publie
Un Jour (1976), puis
Lorelei (1978) et
Trente mille jours (1980). À l'âge de 89 ans, il nourrit encore un projet de roman, traitant du passage de l'enfance à l'adolescence, avec l'intention de mettre en épigraphe une citation de
Victor Hugo : « l'un des privilèges de la vieillesse, c'est d'avoir, outre son âge, tous les âges
[26] ». Il conserve jusqu'à sa mort ses facultés intellectuelles
[27].
Il succombe d'une crise cardiaque le
8 septembre 1980, alors qu'il est en vacances dans sa maison d'Alsudia-Cansades, près de
Jávea (province d'
Alicante) en Espagne. Sur sa table d'écrivain, il laisse inachevé son projet de roman
[28] intitulé
Vent de mars, de même qu'un autre projet,
Nouvelles espagnoles[29]. Il est enterré au
cimetière de Passy à
Paris.
L'ensemble de l'œuvre de Maurice Genevoix procède du témoignage de ce qu'il tient pour mémorable : la vie dans une bourgade de province au bord de la Loire à la fin du XIX
e siècle, les premiers mois de la Grande Guerre, les scènes de la nature et de la chasse en Sologne ou au Canada, le quotidien des hommes dans les colonies françaises. Ses livres sont plus souvent des récits que des fictions. Il est généralement présenté comme un écrivain sensibleanimé du désir de perpétuer Il fait appel à sa mémoire sensorielle peu commune, mais chaque ouvrage est précédé d'une minutieuse recherche documentaire.
Les livres de guerreL'œuvre de Maurice Genevoix doit à sa formation initiale d'écrivain de guerre. Il trouvera son registre dès le premier livre. Par la suite, il gardera le même souci d'exactitude et de précision dans l'évocation des instants gardés en mémoire. Il se révèle persuadé que toute exagération ne peut qu'affaiblir l'effet de la réalité, et n'aspire qu'à rester un témoin fidèle et scrupuleux. Ses lectures l'y avaient préparé : à l'école de
Maupassant, comme à celle de
Stendhal et de
Tolstoï, Maurice Genevoix avait appris la simplicité de la narration.
En décembre 1915, ses carnets de guerre rassemblent quelques notes griffonnées (ordres de bataille, instructions diverses, liste des secteurs, dates). Les quatre premiers chapitres de
Sous Verdun sont esquissés sur le front, dans les intervalles de repos. Le reste tient à l'exercice de la mémoire. Ces notes de guerre s'achèvent en effet très tôt, le 6 septembre 1914. Maurice Genevoix regrettait que l'on eût souvent donné une importance exagérée à ces carnets. Les lettres de 1915 qu'il écrivit, du front, au secrétaire général de l'École normale supérieure, Paul Dupuy, sont davantage documentées.
Ernest Lavisse, directeur de l'école, avait chargé Paul Dupuy de conserver tout une correspondance des élèves envoyés au front, qui devait servir de documents pour rédiger plus tard une histoire de la guerre. Cette correspondance semble avoir depuis été égarée. Quelques mois plus tard, au terme du séjour hospitalier de Genevoix, Dupuy devient l'intercesseur auprès des
éditions Hachette, en la personne de Guillaume Bréton, qui remet alors à l'ancien normalien un contrat pour un livre qu'il rédigera en quelques semaines. Entre-temps, Dupuy n'aura cessé d'exhorter Genevoix d'écrire, alors même que celui-ci n'avait pas encore quitté l'hôpital de Dijon, l'encourageant à reprendre jour par jour tous ses souvenirs. Ainsi écrit-il le 16 juin 1915 : « C'est votre pouvoir à vous de charger de sens les moindres mots ou les gestes les plus simples. » Puis le 20 juin 1915, se faisant plus pressant : « J'aurais un grand chagrin si tout ce qu'il y a d'art en toi demeure en l'état de puissance latente et ne se réalise pas dans la plus riche des matières. »
C'est le désir de témoigner qui le décide à écrire
[. Son récit, parfois interprété comme une thérapie par l'écriture, est servi par une mémoire sensorielle peu commune. Son témoignage de soldat, relaté dans cinq volumes écrits entre 1916 et 1923, tous parus chez
Flammarion, et rassemblés par la suite sous le titre
Ceux de 14, est un document précieux sur la vie des poilus. La censure s'est attardée sur les deux premiers récits qui, la guerre n'étant pas encore achevée, montrait trop la réalité des combats et, plus encore, relatait parfois des paniques. Les coupes furent de ce fait nombreuses (plus de 269 pages lors de la première édition). Ces écrits sont considérés comme l'une des plus grandes œuvres de guerre.
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